Pourquoi les classes moyennes quittent Rennes [Interview]



Comment se répartissent les différentes tranches de revenus à Rennes et dans son aire d’attraction ?

Laurent Auzet : On s’aperçoit que les revenus intermédiaires sont surreprésentés dans la couronne rennaise et sous-représentés à Rennes, Saint-Grégoire et Cesson-Sévigné. Les hauts revenus, eux, sont davantage implantés dans un croissant allant de Pacé à Cesson, en passant par Saint-Grégoire et une partie des quartiers nord de Rennes. Quant aux bas revenus, on relève une prédominance à Rennes et Saint-Jacques-de-la-Lande. Mais également aux limites de l’aire d’attraction de Rennes.

Les bas revenus ont globalement progressé dans le « cœur de métropole » (Rennes, Cesson, Saint-Grégoire, Chantepie, Saint-Jacques)… Faut-il y voir l’effet d’une meilleure application de la loi de solidarité et de renouvellement urbain que dans d’autres communes ?

Il y a une loi, elle est appliquée et on en voit les effets. Il y a eu une hausse du nombre de logements sociaux dans ces communes. De fait, la part des bas revenus est aussi importante dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV, NDLR), principalement composés de logements sociaux.

Les nouveaux quartiers rennais offrent plus de logements aux classes moyennes

Les ménages à bas revenus restent majoritaires aux marges du territoire mais leur part y a fortement diminué entre 2004 et 2017. Comment l’expliquez-vous ?

Dans ces secteurs, les ménages à bas revenus sont souvent des employés agricoles et des personnes âgées. Cette population est de moins en moins nombreuse en raison des décès. Mais aussi parce que d’autres populations, aux revenus plus importants, les remplacent. L’aire d’attraction de Rennes attire des actifs. On observe donc mécaniquement, une montée des groupes à revenus intermédiaires et une baisse des bas revenus liés à un certain type de populations rurales. Reste que, globalement, les revenus ont tendance à décroître en fonction de l’éloignement de la ville-centre.

La montée en puissance des classes moyennes aux confins de la métropole est-elle la conséquence de la forte hausse des prix de l’immobilier ?

L’endroit où l’on s’installe dépend du cycle de vie, selon l’âge, la situation familiale… Ce sont souvent les familles avec enfants qui cherchent à devenir propriétaire d’une maison avec jardin, dans un environnement différent de celui de la ville. Mais cela se fait effectivement sous contrainte budgétaire. La hausse du prix de l’immobilier est un élément de choix.

Rennes donne l’impression d’une ville fracturée entre bas et hauts et revenus, avec peu de classes moyennes…

Les revenus intermédiaires demeurent majoritaires à Rennes, même s’ils sont moins représentés dans les quartiers prioritaires et dans des quartiers plus cossus comme le Thabor. Ils représentent tout de même 52 % de la population rennaise (contre 59 % dans les communes du cœur de métropole, NDLR). C’est moins que la moyenne des communes de l’aire urbaine (75 %, NDLR). Et la tendance est globalement à la diminution des classes moyennes à Rennes et dans les communes limitrophes.

Les nouveaux quartiers rennais ne seraient-ils pas les derniers refuges des classes moyennes dans la capitale bretonne ?

Le terme de refuge est un peu fort. Mais c’est vrai que ces nouveaux quartiers offrent plus de possibilités de logements aux revenus intermédiaires. Beauregard en est un exemple typique. Au départ, il y avait peu d’habitants puis, avec la construction du nouveau quartier, sont arrivés des ménages à revenus intermédiaires ou plus modestes, et même des populations à la limite des hauts revenus. Aujourd’hui à Beauregard, la Courrouze ou Baud-Chardonnet, il y a une mixité très forte. Beaucoup plus que dans d’autres quartiers rennais.

Les revenus ont tendance à décroître en fonction de l’éloignement de la ville-centre

En cœur de métropole, les hauts revenus augmentent, mais dans des proportions assez faibles, finalement…

Même s’ils augmentent dans beaucoup de communes de l’aire urbaine, les hauts revenus demeurent très concentrés à Saint-Grégoire, une partie de Cesson et dans certains quartiers rennais comme le Thabor ou Sud-gare. Pour ce dernier, l’explication principale, c’est que les maisons de ville habitées autrefois par des gens aux revenus plus modestes sont reprises par des personnes à plus hauts revenus. Ce phénomène est corrélé à l’augmentation des prix des logements.

On constate une augmentation disparate des hauts revenus aux quatre coins de la métropole. Cette tendance ne va-t-elle pas à contresens de l’équation éloignement = bas revenus ?

La catégorie des hauts revenus est plus compliquée à lire. La contrainte budgétaire intervient peut-être moins. Le choix est davantage lié à l’environnement, au type d’habitation… Cela peut être dans des endroits où il y avait peu de hauts revenus auparavant. Mais l’arrivée de services, de meilleurs moyens d’accès… peuvent être des facteurs déterminants.

Attirées par la LGV, de nouveaux équipements, le cadre de vie… 5 000 personnes rejoignent chaque année Rennes métropole. Notamment les fameux « Parisiens ». Dans quelle mesure ces nouveaux arrivants modifient-ils la sociologie rennaise ?

Rennes Métropole compte 25 % de cadres. Les nouveaux arrivants sont, à 35 %, des cadres. Il faut cependant nuancer. Les cadres sont plus mobiles que d’autres catégories. Ça joue sur la sociologie rennaise mais les évolutions sont lentes. Quant à l’origine de ces néo-Rennais, il y a effectivement une part de Franciliens, mais aussi beaucoup d’habitants de métropoles de régions voisines comme les Pays de la Loire.

« Plus de riches et plus de pauvres : comment la population de Rennes change » : découvrez l’enquête du Mensuel de Rennes en intégralité dans le numéro de janvier 2023.
« Plus de riches et plus de pauvres : comment la population de Rennes change » : découvrez l’enquête du Mensuel de Rennes en intégralité dans le numéro de janvier 2023. (Le Mensuel de Rennes)
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