Crash du Rio-Paris : aucune condamnation requise contre Airbus et Air France


La colère des parties civiles était palpable, mercredi 7 décembre, après l’annonce des réquisitions du parquet dans le procès du crash du Rio-Paris. Treize ans après le drame, dans lequel 228 personnes ont trouvé la mort, le parquet n’a pas requis la condamnation d’Airbus, ni d’Air France. Selon lui, il n’y a eu aucun « manquement » ni « négligence » en « lien direct » avec la catastrophe. La culpabilité des entreprises « nous paraît impossible à démontrer. Nous savons que cette position sera très probablement inaudible pour les parties civiles, mais nous ne sommes pas en mesure de requérir la condamnation d’Air France et d’Airbus », a ainsi conclu le procureur Pierre Arnaudin.

À ces mots, des applaudissements de colère se sont fait entendre dans la salle d’audience pleine à craquer du tribunal correctionnel de Paris. « J’ai honte d’être Française ! », « À quoi sert la justice ? », ont lancé certaines parties civiles avant de quitter la salle. 

Ces mots ont été prononcés en clôture d’un réquisitoire à deux voix de près de cinq heures et demie, entamé par un préambule qualifiant l’accident du vol AF447, le plus grave de l’histoire d’Air France, de « drame incomparable ». « Cet accident tragique est avant tout un drame humain qui a bouleversé à jamais les proches des victimes », dont la « souffrance a sans cesse été réactivée au cours de ces treize années », un « délai beaucoup trop long », a souligné la procureure Marie Duffourc. « Représenter la société dans un tel procès signifie préserver l’ordre social (et) rappeler que le respect de la vie des personnes humaines n’admet aucun compromis. Néanmoins, ce n’est soutenir les poursuites que si les infractions sont caractérisées », a-t-elle prévenu.

« Aucune faute pénale »

Le 1er juin 2009, le vol AF447 reliant Rio de Janeiro à Paris traversait la zone météo orageuse du « Pot au Noir » quand les sondes anémométriques Pitot, qui mesurent à l’extérieur de l’avion la vitesse de l’appareil, ont givré. Déstabilisés par les conséquences de cette panne, les deux copilotes, bientôt rejoints par le commandant de bord qui était en repos, n’ont pas réussi à reprendre le contrôle de l’avion, qui heurte l’océan 4 minutes et 23 secondes plus tard. 

Il s’agit du énième rebondissement d’une longue procédure. En 2019, un non-lieu avait été prononcé par les juges d’instruction, avant que la cour d’appel n’ordonne un procès en 2021. Mais mercredi 7 décembre, le parquet a estimé que les éléments à charge rassemblés par l’arrêt d’accusation n’étaient pas fondés : il a conclu qu’aucune « faute pénale » n’était établie. Le ministère public a estimé qu’à l’époque, les entreprises n’avaient pas sous-estimé la gravité des défaillances de sondes Pitot, qui s’étaient multipliées dans les mois précédant l’accident. Dans les comptes rendus de ces incidents antérieurs, « il n’y avait jamais eu d’échappée et de perte totale de contrôle de l’avion », a notamment fait valoir le procureur Pierre Arnaudin.

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Parties civiles « choquées »

Par suite, les procureurs ont détaillé pourquoi, selon eux, ni Airbus, ni Air France n’avaient non plus commis de « négligence fautive » sur la formation et l’information des pilotes à cette panne et ses répercussions. « Airbus et Air France pouvaient être fondés à croire, à l’époque des faits, que ces formations et procédures auraient dû suffire à gérer la situation de l’AF447 », a résumé le procureur. 

Il s’est ensuite adressé aux parties civiles. « Nous avons entendu l’insoutenable douleur de la perte de vos proches, votre désir de sanction, que des coupables soient désignés. » « Notre devoir en tant que ministère public, c’est de nous référer (…) à la loi, sans qu’elle puisse être infléchie par les attentes de l’une ou l’autre des parties, fussent-elles ressenties comme légitimes », a poursuivi le magistrat.

Au sortir de l’audience, des proches des victimes et leurs avocats se sont dits « choqués », « outrés » par ces réquisitions. « Quarante-six ans de barre, c’est la première fois que je vois un procureur plaider, il a plaidé la défense d’Airbus et d’Air France, le parquet s’est déshonoré aujourd’hui », a cinglé Me Alain Jakubowicz.

« Une honte », « je ne comprends pas, c’est complètement à charge des pilotes et complètement à décharge des grandes compagnies européennes et nationales », a réagi Sylvie Robert, sœur de David Robert, copilote sur le vol AF447.


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