Parasite Inc. : au cœur de la machine – RADIO METAL

Si Parasite Inc. aura une fois de plus mis le temps (quatre ans contre cinq ans pour l’album précédent, Dead And Alive, ça se réduit tout de même…) et que Kai Bigler, son chanteur-guitariste, considère être « encore en train de développer [leur] son », force est de constater que le groupe de death metal mélodique allemand s’affirme sur son troisième Cyan Night Dreams. Plus agressif, mais aussi plus mélodique. Plus moderne, mais renforçant les éléments synthétiques et électroniques hérités des années 80 et 90. Surtout, Paradise Inc. s’émancipe mieux de ses influences – ou les camouflent mieux – qu’il ne le faisait sur Dead And Alive (2018), à l’instar de celle de Children Of Bodom, groupe qui reste malgré tout important dans le cœur du frontman.

Nous avons justement échangé avec ce dernier afin qu’il nous parle de la nouvelle étape que représente Cyan Night Dreams dans la carrière du groupe – ce dernier ayant élaboré un concept visuel où chaque artwork représente métaphoriquement où en est Parasite Inc. –, album conçu en pleine pandémie, même si celle-ci n’a eu que peu d’influence, et de ses affinités musicales éclectiques.

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« Il y a dix ou vingt ans, le metal était plus centré sur les guitares et plus complexe dans la structuration des chansons, alors que j’ai l’impression que nombre de groupes modernes aujourd’hui ont une approche plus simple à cet égard. C’est un peu ce qui définit le metal moderne pour moi. »

Radio Metal : Vous avez sorti avec le groupe votre premier album live en novembre 2020, Live At The EMFA 2020, enregistré pour le festival en ligne European Metal Festival Alliance 2020. Vous y représentiez le Summer Breeze Open Air avec deux autres groupes. Qu’est-ce que ça représentait pour vous ?

Kai Bigler (chant & guitare) : C’était une expérience assez unique pour nous, car c’était la toute première fois que nous avions un enregistrement live professionnel. C’était aussi la seule opportunité que nous avions de faire un concert pendant la pandémie en 2020. Personnellement, le Summer Breeze était le tout premier festival de metal où je suis allé, car il est situé dans ma région, donc nous étions bien contents de cette opportunité de jouer sur cet événement et de représenter ce festival. C’était aussi une expérience unique parce que, comme c’est marqué sur l’artwork de l’album live, il n’y avait « aucun public autorisé ». En temps normal, on joue ses morceaux et entre ces derniers, on peut interagir avec le public, mais sur ce concert, le morceau était fini et il n’y avait que du silence. Tu as vingt personnes debout devant toi, des techniciens et ingénieurs lumière, et il n’y a aucune réaction. C’était absolument étrange [rires]. Mais globalement c’était amusant à faire.

Les dix chansons de Cyan Night Dreams ont été créées durant la pandémie. Comment les circonstances ont-elles impacté votre travail sur ces chansons ?

Je ne suis pas sûr que la pandémie ait eu le moindre impact là-dessus. Je dirais que ça a peut-être eu impact sur une chanson, « Follow The Blind », qui traite un peu des problèmes de fake news autour de la pandémie, mais en dehors de ça, c’était un processus de composition normal pour nous. Comme nous faisons la plupart des chansons chez nous et qu’ensuite nous les répétons ensemble dans notre salle de répétition, il n’y avait aucune différence par rapport à d’habitude, sans la pandémie, excepté que nous ne pouvions pas répéter les chansons avant de commencer à les enregistrer. Tout le monde a donc dû les répéter chez soi. Nous avons donc dû enregistrer les chansons sans les avoir jouées ensemble. Ce n’est que maintenant que nous les répétons pour les concerts, donc tout arrive un peu plus tard que d’habitude. C’était la seule différence, je suppose, mais ça n’a pas pour autant apporté de stress supplémentaire. C’est juste qu’en ne pouvant pas répéter les chansons ensemble, nous n’avons pas pu faire les petits ajustements habituels ou les adapter en fonction de notre ressenti live, mais ça allait.

D’un autre côté, est-ce que ça ne vous a pas donné plus de temps, justement, pour travailler sur cet album ?

Vu que nous avons toujours des gagne-pains, nous travaillons de sept à neuf heures [rires], donc nous n’avions pas beaucoup de temps pour travailler sur les chansons. La pandémie n’a pas aidé sur ce plan, elle ne nous a pas offert plus de temps pour composer. C’était comme d’habitude un planning serré et la production était stressante.

L’atmosphère de l’album paraît plus sombre que sur vos deux albums précédents : n’y a-t-il pas un lien, conscient ou pas, avec l’ambiance morose des deux dernières années et demie ?

Je ne pense pas non plus que ce soit lié à la pandémie. C’est juste que je voulais que les chansons soient plus sombres et qu’elles prennent une direction un peu différente que sur Dead And Alive. J’ai le sentiment que Dead And Alive a un côté plus léger et l’ensemble sonne un peu plus enjoué, alors qu’avec Cyan Night Dreams, nous voulions rendre tout plus sombre et agressif. C’était simplement une décision que nous avons prise, indépendamment du contexte. Les chansons elles-mêmes parlent d’épreuves personnelles et de choses qui sont arrivées dans ma vie, donc j’imagine qu’il fallait que ça sorte [rires].

Tu as évoqué la chanson « Follow The Blind » : peux-tu nous en dire plus ?

C’était assez fascinant de voir comment les gens recueillaient des informations sur la pandémie. Il y avait beaucoup de désinformation, d’informations mal communiquées, etc. Les gens ont même commencé à douter qu’il y avait une pandémie et un virus. La chanson parle donc de la façon dont les gens s’informaient pour construire leur propre réalité et leur propre vérité, sur la base de ce qu’ils lisaient. Avec internet, tout le monde a la possibilité de diffuser des informations. Je peux moi-même prendre ma caméra et diffuser sur internet. Tout le monde a une tribune et peut donner sa propre vérité aux gens. On peut dire qu’avec la quantité d’informations qui circule, c’est un peu un autre genre de pandémie, car il n’y a plus de filtre. Il y a trente ans, il n’y avait que la télé et les gens de la télé qui filtraient ce qui était diffusé ou pas, alors que maintenant tout le monde peut le faire.

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« Ca a été une bonne expérience de voir si nous étions capables de faire un album avec des contrastes aussi extrêmes dans notre musique. Ça a soulevé des discussions intéressantes au sein du groupe sur la faisabilité. Je me souviens, la première fois que j’ai fait écouter aux autres les démos de ‘I Am’ et ‘Cyan Night Dreams’, ils n’arrivaient pas à voir comment ces deux chansons pouvaient aller ensemble sur un album. »

C’est drôle que votre précédent album s’appelât Dead And Alive, car c’est un petit peu ce que les gens ont ressenti durant le confinement…

En effet [rires]. C’est la première fois qu’on m’en fait la remarque, je n’y avais pas pensé avant. J’imagine qu’effectivement, un peu tout le monde s’est senti à la fois mort et vivant. On était là, mais on ne pouvait rien faire dans la vie, on ne pouvait pas sortir, rencontrer personne, pas de concert, pas même voir la famille, etc. Les deux dernières années nous ont un peu plongé dans un état d’entre-deux, mort et vivant. Après, personnellement, je ne suis pas du genre à tout le temps sortir, donc ça n’a pas fait une énorme différence pour moi [rires]. Excepté qu’il n’y avait plus concert, ce qui était difficile, car ça fait plus de dix ans que nous faisons ça et tout d’un coup, du jour au lendemain, ça s’est arrêté, on se demandait ce qui se passait, « qu’est-ce que je peux faire maintenant ? ». Evidemment, tu vois comment les gens autour de toi gèrent la situation, tu en vois qui ont attrapé la maladie, dont certains gravement voire mortellement. Ce n’était pas une belle expérience.

La biographie promotionnelle dit qu’avec Cyan Night Dreams, vous vous présentez comme étant « plus modernes et pour autant plus années 80 qu’auparavant ». Ça paraît contradictoire. Comment avez-vous abordé cet équilibre entre le côté moderne et le côté old school ?

C’était des discussions : « Il faut que nous soyons plus modernes. » « Mais j’ai envie de conserver tel élément et j’ai envie d’essayer ça. » Parmi les éléments que nous avons voulu conserver, il y avait les synthétiseurs typés années 80, mais à la fois nous voulions opter pour un son plus moderne et une approche plus moderne dans la construction des chansons. Certains de ces éléments étaient déjà présents avant et je dirais que le côté années 80 vient juste des synthétiseurs que nous utilisons, comme le Juno de Roland, ce genre de chose. Ils ont un son bien particulier et nous aimons intégrer ça à notre musique. C’était naturel pour nous de dire : « On a tous ces éléments, voyons ce qu’on garde et comment on peut faire évoluer l’ensemble. » J’imagine que c’était ça le processus. Après, le côté moderne, c’est subjectif, chacun peut l’interpréter différemment. Pour ma part, je dirais qu’il y a dix ou vingt ans, le metal était plus centré sur les guitares et plus complexe dans la structuration des chansons, alors que j’ai l’impression que nombre de groupes modernes aujourd’hui ont une approche plus simple à cet égard. C’est un peu ce qui définit le metal moderne pour moi, mais comme je l’ai dit, c’est subjectif et d’autres gens pourraient ne pas être d’accord. En tout cas, pour notre approche de l’album, c’était juste une question de préférence : on a essayé ci, maintenant essayons ça. Il s’agissait de ne pas se répéter sans arrêt, d’essayer de nouvelles choses et d’entretenir notre excitation. Evidemment, nous aurions pu faire un autre album comme Ten Tears Down ou Dead And Alive, mais ça ne me plaît pas de trop me répéter.

Concernant le côté années 80 : qu’est-ce que cette décennie représente pour vous ?

J’étais né dans les années 80 et je passais la majeure partie de mon temps à regarder des dessins animés et des séries, tout comme dans les années 90, donc j’imagine que ça s’est incrusté en moi. J’aime bien ces décennies et j’imagine que je les porterai en moi toute ma vie [rires]. Je regarde toujours des dessins animés des années 80 et de vieilles séries, et j’aime écouter des groupes des années 80, de la pop au metal. Ça fait simplement partie de moi.

L’album a été mixé et masterisé par Aljoscha Sieg et Seb Monzel des Pitchback Studios, qui sont connus pour leur travail avec des groupes de metal moderne et de metalcore, comme Electric Callboy. Penses-tu que leur expertise était ce dont vous aviez besoin pour atteindre cet objectif de modernité ?

Non, ce n’était pas lié à la façon dont nous voulions créer les chansons. La décision avait déjà été prise quand nous avons rencontré pour la première fois Aljoscha au moment de Dead And Alive, car il a masterisé le dernier album. A l’époque, nous nous étions dit que nous pourrions recollaborer ensemble quand l’album suivant serait prêt. Nous avions mixé Time Tears Down et Dead And Alive nous-mêmes, or c’était un processus chronophage et nous avions un planning plus serré pour Cyan Night Dreams, donc nous avons pensé : « Pourquoi ne pas faire mixer l’album par le gars qui fait aussi le mastering ? » Nous avons donc décidé de donner le mixage aux Pitchback Studios et de voir ce qui en ressortait. Mais je pense que le résultat aurait été le même si nous avions fait le mixage nous-mêmes. Ça aurait peut-être sonné un peu différent sur certains détails, mais je ne pense pas que ça aurait changé grand-chose sur le plan sonore. Ils ont fait le mixage, mais nous avions une idée précise de la façon dont nous voulions que ça sonne, donc il y a eu des échanges entre eux et nous pour trouver le bon son.

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« Je n’imaginais pas amener certains éléments dans la musique, mais avec le temps, je me suis dit : ‘Pourquoi pas ?’ Quand j’étais jeune, je me souviens par exemple que Children Of Bodom était détesté au début parce qu’ils utilisaient du clavier dans leurs chansons : ‘Comment osent-ils utiliser de clavier dans le metal ?!’ »

L’album s’étend dans deux directions : plus agressif d’un côté et plus mélodique d’un autre côté. Le fait de pousser le contraste faisait-il partie de vos plans ou bien est-ce arrivé de façon organique ?

Oui. Nous avions dans l’idée de séparer un peu plus ces deux aspects et de faire un peu plus ressortir les extrêmes. Par exemple, « I Am » est une chanson plus épurée, plus classique disons. Il n’y a pas beaucoup de synthétiseurs et c’est plus brut et direct. Puis il y a des chansons comme « Under Broken Skies » qui joue beaucoup avec les synthétiseurs, les samples, le chant clair, etc. Ce sont là deux extrêmes. C’était l’idée. Je pense que ça a été une bonne expérience pour nous de voir si nous étions capables de faire un album avec des contrastes aussi extrêmes dans notre musique. Mais nous sommes encore en train de développer notre son, donc nous pourrions essayer autre chose sur le prochain album.

Ce n’était pas compliqué parfois de faire en sorte que les extrêmes coexistent ?

Si ! [Rires] Ça a soulevé des discussions intéressantes au sein du groupe sur la faisabilité. Je me souviens, la première fois que j’ai fait écouter aux autres les démos de « I Am » et « Cyan Night Dreams », c’était à peu près les deux premières chansons qui ont été écrites, ils étaient là : « C’est quoi ces trucs ? » Ils n’arrivaient pas à voir comment ces deux chansons pouvaient aller ensemble sur un album. C’était une aventure de faire ça !

Tu as mentionné les synthétiseurs, et il y a en effet beaucoup d’éléments électroniques, voire presque de dance music – je pense à des chansons comme « In False Light » ou « Under Broken Skies ». Penses-tu que la reprise de Scandroid qui concluait Dead And Alive a été une sorte de tremplin pour Cyan Night Dream ?

Pas forcément. Personnellement, quand j’ai écouté Scandroid pour la première fois, je me suis dit : « C’est cool ! J’ai envie de reprendre cette chanson. » Je trouvais que ça pouvait bien s’adapter à un contexte metal. Mais non, la reprise de Scandroid n’est pas liée à cette décision de prendre cette direction. L’envie de donner plus d’espace à l’électronique et au chant clair était déjà là à l’époque où nous avons fait Dead And Alive, mais je suppose qu’il nous fallait nous ajuster au sein du groupe pour la concrétiser.

Quelle est ton histoire avec ce type de musique ? D’où est-ce que ça vient ?

Sur le plan musical, Benjamin [Stelzer] – le batteur – et moi avons toujours fait des expériences avec la musique électronique. Déjà quand nous avons commencé le groupe, nous avons fait quelques morceaux rien qu’avec des éléments électroniques, mais ça ne faisait pas vraiment partie du groupe en soi. Pour le groupe, nous avons décidé d’avoir juste du clavier pour donner aux chansons une atmosphère et les rendre plus vivantes, d’une certaine façon. Mais nous n’avons jamais eu de problème avec la musique électronique. J’écoute de la musique électronique depuis aussi loin que je me souvienne et je suppose que les autres gars dans le groupe y sont également ouverts. Personnellement, je suis ouvert à n’importe quel type de musique, donc il n’y a pas de limites pour moi. Le metal et la musique électronique sont longtemps restés séparés et quand nous avons commencé, je n’imaginais pas amener certains éléments dans la musique, mais avec le temps, je me suis dit : « Pourquoi pas ? » Des groupes comme Electric Callboy montrent aussi que c’est possible de jouer avec des beats et éléments électroniques. Quand j’étais jeune, je me souviens par exemple que Children Of Bodom était détesté au début parce qu’ils utilisaient du clavier dans leurs chansons : « Comment osent-ils utiliser de clavier dans le metal ?! »

En tant qu’auditeur, quel type de musique as-tu écouté en premier ?

Je dirais que ça passait d’un style à l’autre quand j’étais gamin. J’écoutais toute sorte de rock et de pop. La chose la plus agressive que j’écoutais était Queen. Puis j’ai grandi et je me suis plus tourné vers la pop culture ; j’ai même fini par écouter du gabber, le genre de truc qui passait au festival Thunderdome. A un moment donné, je me suis remis au rock, puis au metal. C’est là que je me suis dit que c’était la musique que je voulais faire.

« Quand j’étais gamin, j’écoutais toute sorte de rock et de pop. La chose la plus agressive que j’écoutais était Queen. Puis j’ai grandi et je me suis plus tourné vers la pop culture ; j’ai même fini par écouter du gabber, le genre de truc qui passait au festival Thunderdome. »

Quelles sont tes influences et références dans la musique électronique ?

Quand j’étais un peu plus grand dans les années 90, j’écoutais beaucoup d’eurodance [rires]. Ça a laissé des traces dans ma manière d’utiliser les synthétiseurs et de jouer avec les sons. Au fil du temps, je me suis beaucoup intéressé à la techno hardcore. Dernièrement, il y a quelques années, j’ai découvert la synthwave qui, de toute évidence, m’a aussi influencé. Globalement, si j’aime bien quelque chose, ça me donne envie de m’amuser avec, mais je ne pense pas qu’il y ait des artistes spécifiques… Il y en a trop pour réduire à un ou deux. Peut-être que Scooter a eu un impact. J’aime aussi Celldweller, par exemple : Klayton est un producteur vraiment cool dans l’électronique. Il y a aussi d’autres gars comme Richard Devine. Il y a plein de gens super qui font d’excellentes musiques électroniques.

Sur Dead And Alive on pouvait encore assez bien entendre vos inspirations metal, surtout sur une chanson comme « Headfuck Rollercoaster » où vous ne pouviez pas nier l’influence de Children Of Bodom. Penses-tu qu’avec Cyan Night Dreams vous soyez parvenus à être plus Parasite Inc. ?

Oui, clairement. Je ne me suis jamais senti aussi proche de la définition du son de Parasite Inc. Par le passé, c’était toujours : « Cette chanson est cool mais on peut entendre l’influence de Children Of Bodom là-dessus. » On pouvait clairement entendre nos influences. Avec Cyan Night Dreams, sur certaines chansons, pour la toute première fois, je trouve que nous avons quelque chose d’unique, on ne peut pas dire que ça sonne comme ci ou ça. En tout cas, c’est mon avis, car tout le monde entend des choses différentes – on a parfois eu des gens qui nous disaient : « Ça sonne comme Accept » ou « Ça sonne comme Blind Guardian », et t’es là : « Je n’en ai aucune idée, mais d’accord. » Personnellement, c’est la toute première fois que nous sommes arrivés à avoir un son qui nous est propre. Je ne dirais pas que c’était un objectif forcé d’en arriver là, mais comme nous avons toujours fait la composition et les enregistrements seuls, sans aucun producteur ou aucune aide extérieure, au fil des dernières années, nous avons gagné en expérience. Avec chaque nouvel album on est plus expérimentés, donc Cyan Night Dreams présente un groupe qui a mûri.

On a plusieurs fois mentionné Children Of Bodom et tu sembles être un grand fan de ce groupe. On a perdu Alexi Laiho il y a un an et demi. Qu’est-ce qu’il représentait pour toi ?

C’était évidemment une énorme influence pour mon jeu de guitare. C’était aussi un rêve de se dire qu’un jour on tournerait peut-être avec Children Of Bodom. Nous ne pouvons pas nier l’influence de ce groupe par le passé. Il avait un grand talent pour la composition, avec la façon dont ils intégraient de petits breaks et créaient un son très atmosphérique. Il existe plein de bons guitaristes, incroyablement doués, super rapides, etc. mais pour moi, le plus intéressant dans Children Of Bodom, c’était leur capacité d’écriture, de créer des mélodies et des chansons impressionnantes qui restent en tête. C’était génial d’avoir pu le rencontrer et même de partager la scène avec lui. C’était important pour moi. Nous l’avons rencontré une fois après avoir fait un concert ensemble. C’était quand il y a eu l’attaque terroriste au Bataclan en 2015. Children Of Bodom était censé être en tournée avec Lamb Of God. A cause de l’attaque, Lamb Of God a annulé la tournée, mais Children Of Bodom a décidé de continuer et notre représentant au label était en quelques sorte leur impresario. Ils avaient une place pour un concert pas loin de chez nous et il nous a offert l’opportunité de jouer avec eux. Nous avons rencontré le groupe après le concert et nous avons un peu parlé. Je me suis senti comme les gars de Wayne’s World : « On mérite pas ! » [Rires] J’étais complètement stressé, mais il était très sympa. Il n’était évidemment pas comme il était sur scène. Je l’ai rencontré à nouveau une ou deux fois lors du Summer Breeze, mais c’était plus pour dire : « Bonjour, comment ça va ? »

Soit dit en passant, sur la chanson que j’ai mentionnée tout à l’heure, « Headfuck Rollercoaster », était-ce une influence consciente voire un hommage ?

« Headfuck Rollercoaster », en fait, c’est plus une chanson à la Synergy, en tout cas pour le riff principal, c’est là qu’il prend sa source. A l’époque, j’avais fait écouter Synergy à notre ancien guitariste, nous avons fait un peu les idiots et il a trouvé ce riff. Il a fait une démo de l’intro et c’est devenu ensuite « Headfuck Rollercoaster ». Le morceau a un côté Children Of Bodom, mais en fait, ça vient de Synergy. Ça reste le même guitariste dans les deux groupes, ceci dit [rires].

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« Il existe plein de bons guitaristes, incroyablement doués, super rapides, etc. mais pour moi, le plus intéressant dans Children Of Bodom, c’était leur capacité d’écriture, de créer des mélodies et des chansons impressionnantes qui restent en tête. »

Cyan Night Dreams a été soutenu par Initiative Musik dans le cadre du Neustart-Kultur-Programm. Peux-tu nous dire ce que c’est ?

C’est une institution du gouvernement allemand. C’est fait pour aider les groupes avec leur production. On peut obtenir un soutien financier de leur part pour concrétiser nos projets de production ou pour monter une tournée. Comme il y a eu la pandémie, nous n’avions évidemment aucun concert, donc nous avons commencé avec strictement aucun budget pour la production, donc nous avons candidaté pour ça, ils nous ont acceptés et nous avons eu un financement pour l’album. Ça nous a grandement facilité les choses. Evidemment, comme c’est une institution allemande, il faut faire beaucoup de paperasse et passer par plein de bureaucratie, mais ça nous a beaucoup aidés. Je ne connais pas d’autres organismes de soutien comme ça en Allemagne. Je suppose que c’est la seule institution gouvernementale en Allemagne qui aide les artistes à atteindre leurs objectifs.

Vous avez apparemment développé un concept pour Cyan Night Dreams. Peux-tu nous en parler ?

Pour chaque album, nous avons un artwork spécifique lié au statut du groupe. Sur le tout premier disque que nous avons sorti, on voit un mécanisme d’horloge ouverte avec des monstres en dessous, puis quand nous avons sorti Time Tears Down, il y avait plein de chansons de la démo que nous avons réenregistrées avec un meilleur son et mieux jouées pour l’album, donc nous nous sommes dit : « Pourquoi ne pas réutiliser l’artwork, mais en le faisant évoluer ? » Le mécanisme d’horloge est devenu une vraie horloge et les monstres étaient cette fois morts. Ça montrait une sorte d’évolution du groupe. C’était pareil pour Dead And Alive qui montrait une autre évolution du groupe. A l’époque cinq ans s’étaient écoulés entre les albums, beaucoup de gens disaient : « Je ne savais pas que vous existiez encore ! » Donc nous avons eu cette idée de cœur mécanique qui pompe mais à la fois est mort, pour ainsi dire, donc mort et vivant. Pour Cyan Night Dreams, nous avons eu l’idée de mettre le cœur dans cette machine. D’une certaine façon, cette machine qu’on voit sur l’artwork, c’est le groupe. C’est une sorte de monstre que nous avons créé [petits rires]. Il y a aussi une symbolique avec les trois rayons de lumière qu’on voit. L’un est la partie traditionnelle de notre son, un autre est notre approche moderne, et ce qui ressort au centre, c’est le résultat. Nous alimentons la machine avec différents styles et le mélange est ce qu’on entend sur Cyan Night Dreams. Le concept est donc musical et visuel, mais du point de vue des paroles, il n’y a pas de concept particulier. Chaque chanson a son propre univers et sa propre signification, elles ne sont pas liées.

Qu’est-ce que ce sont ces « rêves de nuit cyan » ?

C’est difficile à expliquer. Ce n’est pas trop mon truc d’expliquer les chansons, j’ai envie de laisser les auditeurs se faire leur propre idée sur celles-ci. Pour donner un indice, « cyan night dreams » est un jeu de mot avec « cyanide dreams », mais les paroles sont très personnelles pour moi, donc j’hésite toujours à en parler.

As-tu une relation particulière aux rêves ?

Peut-être que je suis parfois un trop grand rêveur et pas assez réaliste [rires]. D’une certaine façon, la chanson parle des rêves qu’on a dans la vie et comment on peut les atteindre ou pas.

Penses-tu qu’il faille être un rêveur pour être un artiste ?

Peut-être. Il faut avoir le rêve d’être quelqu’un ou de faire quelque chose. Quand d’autres gens disent que ce n’est pas possible, tu dis : « Peu importe, je continue à poursuivre mon rêve. » Mais ce n’est pas seulement pour les artistes, je suppose que ça vaut pour tout ce qu’on cherche à atteindre dans la vie, si on veut être un astronaute ou si on veut acheter une voiture.

Rêves-tu parfois de musique ? Est-ce qu’il t’arrive de trouver des riffs ou des mélodies dans tes rêves ?

Oh oui ! [Rires] Je rêve de mélodies. Pareil, quand je me réveille, je les ai encore en tête, et parfois elles ne sont plus là, et je me dis : « Pourquoi je me suis réveillé ? Elle était super cette mélodie ! » Je rêve même parfois d’être en concert. Il y a deux chansons que j’ai composées sur la base de mélodies que j’ai rêvées, mais elles ne sont pas liées à Parasite Inc. C’est pour un autre projet. Il est probable que l’une d’entre elles sorte un jour avec Parasite Inc. mais l’autre est juste un morceau typé synthwave. C’est un petit projet personnel sur lequel je suis en train de travailler.

« Pour Cyan Night Dreams, nous avons eu l’idée de mettre le cœur dans cette machine. D’une certaine façon, cette machine qu’on voit sur l’artwork, c’est le groupe. C’est une sorte de monstre que nous avons créé [petits rires]. »

Tu as donc un projet synthwave ?

Oui. En tout cas, je suis en train de travailler dessus. C’est de la musique électronique, mais ça ne se résume pas qu’à la synthwave. Il y a un côté pop. C’est totalement différent de Parasite Inc. Pour moi, c’est un terrain de jeu où je ne suis pas obligé de me restreindre dans ce que j’ai envie d’essayer.

As-tu l’impression que Parasite Inc. est parfois trop contraignant artistiquement ?

Peut-être, oui, mais à la fois, si je mettais tout dans Parasite Inc. il est probable que personne n’aimerait. Il y a des choses qui ne sont pas adaptées au contexte d’un groupe. Nous sommes un groupe de metal, donc je ne peux pas amener des éléments qui ne sont pas liés à ce qu’un groupe de metal peut faire. Par exemple, si je fais une chanson avec uniquement des synthétiseurs, nous n’avons plus rien à faire en tant que musiciens. S’il n’y a pas de guitare, je n’ai pas besoin de de jouer de la guitare. S’il n’y a pas de batterie, le batteur est au chômage [rires].

Parasite Inc. a été formé en 2007 et a sorti son premier album, Time Tears Down, six ans plus tard. Votre second album, Dead And Alive, est sorti encore cinq ans plus tard. On dirait que jusqu’à présent vous avez pris votre temps…

Nous avons nos vies [rires]. Nous sommes obligés de travailler tous les jours. C’est beaucoup de travail quand on a un gagne-pain, qu’on revient à la maison et qu’on a encore du travail derrière parce qu’il faut composer et tout. Je suppose que quand nous étions plus jeunes, c’était plus un passe-temps. Nous ne nous attendions pas à un jour sortir de la salle de répétition. C’était juste amusant pour nous de nous retrouver en répétition, boire, éclater nos instruments, etc. Puis nous sommes sortis de la salle de répétition pour monter sur notre première scène, mais il n’y avait aucune intention professionnelle de notre part. Pendant longtemps, nous n’avions pas de tourneur, ni de management – encore aujourd’hui nous n’avons pas de management ! Ça explique en partie pourquoi, parfois, les choses prennent du temps avec nous. Surtout durant les premières années, tout était vague, nous avions nos problèmes personnels et nous n’avions pas l’intention de faire vite avancer le groupe. Je suppose qu’entre chaque album, il se passait plein de choses dans notre vie quotidienne jusqu’aux autres projets dans lesquels nous étions impliqués. Personnellement, j’étais aussi impliqué dans l’enregistrement d’autres groupes, à les aider avec leur production. Il y a eu plein de choses qui n’étaient pas liées à Parasite Inc. et qu’on ne peut pas voir de l’extérieur. Ça explique le temps entre les albums.

Et aujourd’hui, quelles sont vos ambitions pour l’avenir avec ce groupe ?

Entre Time Tears Down et Dead And Alive, il y a eu cinq ans. Maintenant entre Dead And Alive et Cyan Night Dreams, c’est quatre ans. Donc peut-être que nous pourrons faire le prochain album dans trois ans [rires]. Je suis à peu près certain qu’à partir de maintenant, nous ne serons plus aussi silencieux. Il y a beaucoup de choses que nous avons prévu de faire l’année prochaine sur le plan musical, donc peut-être que le prochain album prendra un peu de temps, mais nous avons des plans pour sortir de la musique plus tôt. Nous aimerions nous professionnaliser davantage si nous en avons l’occasion. Ce serait évidemment un rêve de pouvoir jouer plus, de sortir plus de musique, etc. On verra ce que nous apportera Cyan Night Dreams. C’est difficile à dire. C’est déjà difficile à dire comment sera le prochain hiver avec la pandémie, si tout s’arrête à nouveau et qu’on se retrouve encore en confinement pendant deux ans, sans concert. Nous voulions d’ailleurs faire une tournée européenne à l’automne avec la sortie de Cyan Night Dreams, mais à cause de la pandémie, ce n’était pas possible de caler quoi que ce soit. D’abord, nous ne savions pas si nous pouvions prévoir des choses et ensuite, quand nous pouvions enfin dire « c’est bon, on pourrait faire la tournée », d’autres tournées reportées ont été reprogrammées à l’automne cette année et il n’y avait plus de salles disponibles. Il y a eu deux années sans rien et maintenant, tout arrive d’un coup. Il faudra attendre pour voir comment ça se passe et croiser les doigts.

Interview réalisée par téléphone le 20 juillet 2022 par Nicolas Gricourt.
Retranscription & traduction : Nicolas Gricourt.

Site officiel de Parasite Inc. : www.parasiteinc.de

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