Dans la ville antique de Maresha en Israël, des archéologues de l’Autorité des antiquités israélienne et de l’université de Haifa ont découvert plus de 600 astragaloi. En raison de leur forme cubique, ces osselets (astragales) provenant de caprins, d’ovins et de bovins ont été utilisés pour jouer, par les adultes comme par les enfants, mais aussi pour accomplir des rituels et dans le cadre de la divination, expliquent les chercheurs dans la revue Levant. Polis, modifiés par l’ajout de métaux ou recouverts d’inscriptions, ils dévoilent les rêves et les aspirations de cette société de l’âge hellénistique (entre le IVe et le IIe siècle avant notre ère), pour laquelle les frontières entre les différentes cultures et surtout entre le sacré et le quotidien n’étaient pas si marquées.
Des centaines d’osselets ont été découverts dans les souterrains de la ville antique de Maresha
Connu depuis 120 ans, le site archéologique de Maresha se trouve dans le sud d’Israël. Au cours de la période hellénistique (IVe-IIe siècle avant notre ère), c’était une ville prospère, où la population locale, les Iduméens, cohabitait avec d’autres populations – principalement des Arabes, des Phéniciens, des Macédoniens et des Égyptiens. Les deux langues officielles étaient le grec et l’araméen. Divisée en deux zones, une ville haute, juchée sur le Tel Maresha, et une ville basse, déployée tout autour, Maresha est surtout connue pour ses centaines de salles souterraines creusées dans la craie, à un ou deux mètres sous les maisons. Ces pièces servaient à l’origine de dépôts domestiques et d’installations annexes (entrepôts, citernes, pressoirs, columbariums…). Puis elles ont été reliées, pour créer un système de grottes artificielles que les archéologues dénomment “complexes souterrains”. Les fouilles intensives menées depuis 30 ans ont mis au jour de nombreux débris, dont des poteries, des lampes à huile, des pièces de monnaie, des figurines, des autels, des ostraca (tessons de poterie) et plus de 600 astragaloi. Même si l’on a retrouvé des astragales sur de nombreux sites archéologiques, puisque leur usage remonte au néolithique et qu’ils étaient très fréquents dans le monde grec et au Proche-Orient, ils sont cependant plus rares dans la zone du Levant hellénistique. La collection de Maresha est donc unique, écrivent les chercheurs, à la fois par sa taille et par ses caractéristiques, car la plupart de ces osselets ont été modifiés par les habitants. L’analyse détaillée de leurs modifications donne un aperçu des différentes fonctions qui leur ont été attribuées.
L’astragale est un os cubique qui peut être lancé ou jeté
L’astragale est un os articulatoire du jarret, qui chez un certain nombre de mammifères, se présente sous la forme d’un “osselet”. Comptant six faces, il peut être lancé en l’air ou jeté sur une surface pour servir de dé. Dans ce cas, il peut être modifié, par polissage ou percement, afin de le remplir de plomb et de l’alourdir, en vue d’obtenir de meilleurs résultats. La forme des astragaloi directement fabriqués en os est si prégnante qu’il en existe des répliques dans divers matériaux, comme le plomb, le bronze, la pierre, l’ivoire et le verre.
Jeux d’adresse et de hasard
Pour savoir comment étaient utilisés ces osselets, les chercheurs peuvent en premier lieu s’appuyer sur différentes sources, dont des textes et des illustrations. Enfants et adultes jouent aux osselets depuis la préhistoire, dans des jeux d’adresse et de hasard, dont le plus célèbre est “le jeu des cinq pierres” (en grec penthelita), au cours duquel on doit lancer en l’air 5 astragales avant de les rattraper avec la main. Comme le mentionnent des sources historiques, les jeux d’astragales étaient souvent pratiqués par les filles, et même si les garçons et les hommes adultes y jouaient aussi, les osselets étaient également liés aux jeunes femmes en raison de leur association avec Éros, le dieu grec de l’amour, dans le but de leur assurer un bon mariage.
Dans la ville antique de Maresha en Israël, des archéologues de l’Autorité des antiquités israélienne et de l’université de Haifa ont découvert plus de 600 astragaloi. En raison de leur forme cubique, ces osselets (astragales) provenant de caprins, d’ovins et de bovins ont été utilisés pour jouer, par les adultes comme par les enfants, mais aussi pour accomplir des rituels et dans le cadre de la divination, expliquent les chercheurs dans la revue Levant. Polis, modifiés par l’ajout de métaux ou recouverts d’inscriptions, ils dévoilent les rêves et les aspirations de cette société de l’âge hellénistique (entre le IVe et le IIe siècle avant notre ère), pour laquelle les frontières entre les différentes cultures et surtout entre le sacré et le quotidien n’étaient pas si marquées.
Des centaines d’osselets ont été découverts dans les souterrains de la ville antique de Maresha
Connu depuis 120 ans, le site archéologique de Maresha se trouve dans le sud d’Israël. Au cours de la période hellénistique (IVe-IIe siècle avant notre ère), c’était une ville prospère, où la population locale, les Iduméens, cohabitait avec d’autres populations – principalement des Arabes, des Phéniciens, des Macédoniens et des Égyptiens. Les deux langues officielles étaient le grec et l’araméen. Divisée en deux zones, une ville haute, juchée sur le Tel Maresha, et une ville basse, déployée tout autour, Maresha est surtout connue pour ses centaines de salles souterraines creusées dans la craie, à un ou deux mètres sous les maisons. Ces pièces servaient à l’origine de dépôts domestiques et d’installations annexes (entrepôts, citernes, pressoirs, columbariums…). Puis elles ont été reliées, pour créer un système de grottes artificielles que les archéologues dénomment “complexes souterrains”. Les fouilles intensives menées depuis 30 ans ont mis au jour de nombreux débris, dont des poteries, des lampes à huile, des pièces de monnaie, des figurines, des autels, des ostraca (tessons de poterie) et plus de 600 astragaloi. Même si l’on a retrouvé des astragales sur de nombreux sites archéologiques, puisque leur usage remonte au néolithique et qu’ils étaient très fréquents dans le monde grec et au Proche-Orient, ils sont cependant plus rares dans la zone du Levant hellénistique. La collection de Maresha est donc unique, écrivent les chercheurs, à la fois par sa taille et par ses caractéristiques, car la plupart de ces osselets ont été modifiés par les habitants. L’analyse détaillée de leurs modifications donne un aperçu des différentes fonctions qui leur ont été attribuées.
L’astragale est un os cubique qui peut être lancé ou jeté
L’astragale est un os articulatoire du jarret, qui chez un certain nombre de mammifères, se présente sous la forme d’un “osselet”. Comptant six faces, il peut être lancé en l’air ou jeté sur une surface pour servir de dé. Dans ce cas, il peut être modifié, par polissage ou percement, afin de le remplir de plomb et de l’alourdir, en vue d’obtenir de meilleurs résultats. La forme des astragaloi directement fabriqués en os est si prégnante qu’il en existe des répliques dans divers matériaux, comme le plomb, le bronze, la pierre, l’ivoire et le verre.
Jeux d’adresse et de hasard
Pour savoir comment étaient utilisés ces osselets, les chercheurs peuvent en premier lieu s’appuyer sur différentes sources, dont des textes et des illustrations. Enfants et adultes jouent aux osselets depuis la préhistoire, dans des jeux d’adresse et de hasard, dont le plus célèbre est “le jeu des cinq pierres” (en grec penthelita), au cours duquel on doit lancer en l’air 5 astragales avant de les rattraper avec la main. Comme le mentionnent des sources historiques, les jeux d’astragales étaient souvent pratiqués par les filles, et même si les garçons et les hommes adultes y jouaient aussi, les osselets étaient également liés aux jeunes femmes en raison de leur association avec Éros, le dieu grec de l’amour, dans le but de leur assurer un bon mariage.
Alexandre l’Athénien, Les joueuses d’osselets. © Encyclopædia Britannica / Wikimedia Commons
Usages symboliques
Mais les astragaloi retrouvés lors de fouilles archéologiques apparaissent aussi dans divers contextes qui laissent entendre que leur usage relevait tout autant du symbolique. On en a découvert certains dans des tombes d’enfants et plus largement dans des contextes funéraires, parfois même enfermés dans le récipient spécifique, le phormiskos, qui était utilisé pour les garder. Les astragaloi étaient aussi associés aux rites de passage de l’enfance à l’âge adulte, en particulier pour les jeunes filles, symbolisant alors la jeunesse et la période antérieure au mariage. Ils revêtaient un autre usage rituel en tant que garantie de bonne fortune pour une maisonnée : on les consacrait avant de les déposer dans les fondations ou sous le plancher. On sait enfin qu’ils étaient utilisés pour prédire l’avenir (astragalomancie) en association avec des plateaux de jeu, car pendant l’Antiquité, le divertissement, et en particulier les jeux de société, étaient conçus comme un moyen de communiquer avec les divinités. On comprend donc combien le contexte de leur mise au jour est primordial pour définir leur mode d’usage et le rôle qui leur était attribué, même si, comme l’admettent les chercheurs, “la frontière entre les différents rôles joués par les astragales est souvent floue”.
Un cinquième des astragaloi de Maresha ont été modifiés
À Maresha, les astragaloi étaient essentiellement d’origine caprine et ovine. Les analyses prouvent qu’il s’agissait de restes de boucherie ou bien d’os provenant des carcasses après consommation de la viande. Les chercheurs considèrent donc que les habitants les gardaient intentionnellement pour s’en servir. Ils disposent ensuite d’indices majeurs pour les guider dans leur interprétation : les modifications qui ont été opérées sur le matériau osseux et la localisation des osselets sur le site de la ville antique. En effet, un cinquième des astragales retrouvés dans la ville basse présentaient des modifications d’origine humaine ; ils ont été polis, percés, remplis avec du métal ou incisés pour y graver des inscriptions : des formes géométriques, des chiffres, ou des lettres formant parfois des mots en grec.
Jouer pour gagner
Dans un complexe souterrain situé sous une zone résidentielle et composé de 70 pièces, les astragales retrouvées côtoyaient des poteries, des lampes, du verre, de la faïence, des ostraca, bref toute une série de débris domestiques. Comme l’indiquent les inscriptions gravées sur quatre d’entre eux, où l’on peut déchiffrer les termes “victoire”, ou bien “‘j’ai”, on peut imaginer des scènes de jeux et de paris dans les maisons attenantes. D’autres mentionnent des dieux, comme Aphrodite, Éros ou Héra, la déesse du mariage, et indiquent la volonté de trouver la chance en amour.
Certains astragales portent des inscriptions, comme Niké (victoire) ou Héra. © Roee Shafir, Sapir Haad / Lee Perry-Gal et al. / Levant
Jouer pour connaître l’avenir
Dans un autre complexe situé face à l’un des cimetières de Maresha, des astragales ont été découverts dans un contexte cultuel, puisque certaines pièces, ornées de figures directement sculptées sur les parois, ont très certainement servi de lieux de culte, comme le prouve également la présence d’un autel. Dans cette même zone, un fragment de plateau de jeu a été mis au jour, indiquant le lien entre jeu et culte, ce que l’on voit de manière encore plus flagrante dans deux autres complexes situés tout près d’un sanctuaire. Ces deux grottes contiennent chacune plusieurs autels à encens et de multiples objets liés au culte – vases à offrandes (kernoi), inscriptions votives, figurines, lampes à huile, phalli de craie – et des fragments de plateaux de jeu portables. Leur mauvais état ne permet pas toujours d’identifier les jeux qui pouvaient y être pratiqués, mais certains ressemblent à des plateaux de Pente grammai (“jeu des cinq lignes”), l’un d’eux pourrait avoir été destiné à jouer au jeu égyptien Senet (“jeu des trente carrés”), et certains autres au jeu de société Polis. Les chercheurs présument ainsi que les très nombreux astragales retrouvés dans ces deux vastes complexes ont pu être utilisés en même temps que ces plateaux, non simplement pour jouer mais pour pratiquer la divination. Car ils ont également mis au jour les pions (pessoi), faits de verre ou de coquillages, qui étaient proprement destinés au jeu.
Les osselets apportent une réponse aux grandes questions de la vie
Les astragaloi comme moyen d’invoquer le hasard s’inscrivent dans le mode oraculaire de la cité hellénistique, où les textes divinatoires, écrits en araméen et qui ont été retrouvés dans les mêmes complexes souterrains, sont construits sous forme d’implications (“si ceci…, alors cela…”). Ils apportent ainsi une réponse aléatoire dans un contexte d’interrogations multiples, et cette réponse prophétique se comprend selon les grilles explicatives inscrites sur les plateaux de jeu. C’est pourquoi les astragaloi destinés à la divination portent aussi des mentions, mais il s’agit dans ce cas de marques ou de chiffres, formant des combinaisons. Dans ces pièces souterraines, les habitants de Maresha ne lançaient donc pas les dés en invoquant la victoire ou pour uniquement souhaiter faire un bon mariage ; ils s’adressaient aux divinités pour obtenir des réponses à leurs questionnements, que ce soit sur une future naissance, sur leur état de santé ou plus largement sur le sens de la vie. Les astragaloi de Maresha semblent donc avoir joué un rôle important dans différents contextes de la vie de la cité, prouvant que les sphères du sacré et du quotidien n’étaient pas vraiment cloisonnées – à l’image de l’immense sphère souterraine qui s’étend sous la ville, et dont il reste encore une grande partie à découvrir.
We want to say thanks to the author of this short article for this remarkable material
Dans le Levant antique, on jouait aux osselets pour connaître l’avenir – Sciences et Avenir
Check out our social media accounts and other related pageshttps://nimblespirit.com/related-pages/